À cette heure-ci il devrait être là et nous sommes inquiets…jamais sa promenade ne se prolonge ainsi au delà d’un couple d’heures ….
Son absence a créé un grand trou dans le lac paisible de la soirée…pourtant, quand il est présent, on ne s’en aperçoit guère tant il reste calme et silencieux ….
Depuis combien de temps est-il avec nous ? Dix ans?…douze ans ?…on ne sait plus trop bien !…il faut faire un effort et chercher des repères…voyons!…c’était l’année de la grande sécheresse : onze ans donc!…et ces années ont passé insensiblement au cours desquelles il a creusé sa place dans notre vie ….et ce soir, il n’est pas là et remontent à notre mémoire les souvenirs accumulés !
L’oreille tendue vers les bruits de la nuit, à nos yeux défilent les images des saisons enfuies et nous revoyons nos courses aux lisières des bois, nos simulacres de combats et nos soirées au coin du feu, l’un réchauffant l’autre.
On a le sentiment d’avoir vécu, sans les voir, des heures uniques et d’être passé, indifférents, à côté de l’essentiel…
À présent, ce soir, il n’est plus là….et s’il allait ne plus revenir?
Tout à pu arriver….accident…fugue…mort….et l’angoisse nous étreint…
La lumière de la pièce s’est concentrée sur la place vide et les heures passent ….il faudrait aller se coucher…mais dans cette incertitude, comment dormir ?
Il faut attendre, éveillés,….au moins, si l’attente est vaine aurons nous eu le sentiment d’agir !
Mais, la porte à bougé et mon cœur à bondi…je connais ce léger choc et me précipite….
C’est bien toi, mon chien, qui rentres, guilleret, et d’un léger coup de museau ébranle la porte….c’est bien toi, le regard candide, qui nous dévisages sans savoir que durant quelques heures tu as ouvert un gouffre dans notre âme….
Mais, vas, sois tranquille et couches toi en soupirant dans ton coin…la vie est désormais en ordre…tu n’y comprendra rien, mais je te le dis quand même :
“Merci !”