BERTSU : poème improvisé et chanté en basque (voir Bertso)
Je reconnais l’écriture de mon père, qui était en Syrie pendant la guerre, mais j’ignore si c’est lui qui l’a composé.
En l’an mille neuf cent quarante,
j’ai écrit une douzaine de couplets dans une ville de Syrie,
pour que les basques les chantent dans la bonne humeur
en espérant revenir vite, ensemble à la maison
Je me rappellerai toujours mon départ à la guerre
Quel chagrin en laissant ma famille à la porte de ma maison,
En disant au revoir à ma compagne et à mon enfant,
quelques larmes s’échappant au milieu des baisers donnés.
Elle m’avait dit de ne pas trop désespérer
d’offrir mon cœur à la vierge Marie
pour qu’elle ramène entière notre carcasse
et qu’elle prie le plus souvent pour moi.
En attendant, je partis joyeux
car de bonnes nouvelles nous parvenaient de France
que les soldats étaient bien en Syrie
mais en arrivant ici le pays ne nous a pas plu.
Voilà où nous sommes en Syrie, dans une ville nommée Tripoli
en laissant de côté une belle ville, Beyrouth,
nous sommes au sommet d’une montagne
tous les jours en exercices.
Je pense que nous ne sommes pas les plus malheureux.
Ne sont pas aussi bien ceux qui sont sous les balles,
dans le mauvais temps,
en comptant surement les jours et les nuits.
Se levant le matin à sept heures
on prend le travail jusqu’à onze heures.
Après le déjeuner on est libre jusqu’à deux heures,
il me semble que l’on a pas trop à se plaindre.
Au Dieu du ciel nous faisons une demande,
de grâce vois notre disgrâce
d’être éloignés de nos terres.
De rentrer en France quel plaisir nous aurions.
Les Basques nous nous rassemblons,
le soir le plus souvent possible,
pour jouer aux cartes, en buvant un peu de vin
et en levant la gourde du pays basque à bout de bras.
Ici le vin fait alléger le porte-monnaie,
car nous payons sept francs le litre.
Les basques sont bons à boire le vin,
mais quand le tour de payer arrive, certains s’échappent.
Quand vient l’heure du repas du soir,
nous commençons à nettoyer nos plateaux
en nous rappelant la bonne soupe de la maison
qui nous plaisait mieux.
Je dédie cette douzaine de couplets à qui les voudra.
Les ayant couchés sur le papier comme elles me venaient pour les chanter.
Je laisserai ma place de bon cœur,
en échange d’un litre de vin. UN SEMPERTAR