A l’origine c’étaient des bœufs qu’on faisait courir dans les rues d’Hasparren et après ils étaient tués et on donnait la viande à l’hôpital et aux nécessiteux. Nous, les courses qu’on a connues n’avaient lieu que pour Carnaval : c’était le jeudi gras, le dimanche et le mardi gras. À l’époque il n’y avait des courses de vaches qu’à Hasparren et aussi à Bayonne, place St André, pour les fêtes. Mais les deux courses étaient très différentes. En tout cas ça n’avait rien à voir avec les courses de maintenant. C’était un évènement renommé, les gens venaient de tous les environs et toutes les usines d’Hasparren fermaient l’après-midi des courses de vaches.
Quelques jours auparavant il y avait l’arrivée des vaches. Elles arrivaient à pied de Habas, dans les Landes avec un vacher. Il y avait une vieille vache, plus calme que les autres, qui passait devant, avec le vacher. Elles avaient leur écurie à l’hôtel de France. Si on était bien avec le vacher, on pouvait savoir le nom des vaches, je me souviens d’une qui s’appelait « Rafitolera ». Il nous renseignait aussi sur leurs caractères : « celle-là elle court vite mais elle n’est pas méchante, celle-là, attention, elle cherche partout, si tu la vois, échappes-toi… »
Ça se faisait dans les rues d’Hasparren, depuis l’hôtel de France, au bout de la rue de la mairie (rue Jean Lissar) jusqu’à la place des Tilleuls. La rue montante aussi était ouverte à moitié et plus bas ça allait jusqu’au parking St Jean et en bas de la poste. On aimait beaucoup, chez Bordarrampé (aujourd’hui c’est le restaurant des Tilleuls), le bar était ouvert, on faisait rentrer la vache par un côté et ressortir par l’autre côté. Si tu voulais être à l’abri, il fallait sauter derrière le bar ! Là où elle sortait, c’était juste en face de la mairie qui était ouverte aussi, jusqu’au premier étage par le grand escalier ! Ma maison aussi était ouverte ; elle avait deux issues, une dans la rue de la mairie et une autre dans la rue montante (rue de l’Ursuya). Plusieurs fois la vache est entrée dans ma cuisine ! Chaque fois que la vache rentrait dans un bâtiment, il y avait danger car on ne savait pas si elle allait sortir par l’autre issue ou faire demi-tour !
On portait des habits qui ne craignaient rien, et aux pieds des espadrilles bien lacées. Pendant l’après-midi, huit vaches se relayaient pour courir dans les rues d’Hasparren. Par sécurité elles avaient une longue corde qui trainait par terre et qui permettait de l’écarter si elle devenait dangereuse. Il y avait bien sûr des barrières pour protéger ceux qui ne voulaient pas courir, certains se mettaient autour du monument aux morts. Entre les tilleuls de la place de l’Eglise, des cordes étaient tendues en hauteur : on pouvait s’y suspendre pour échapper à la vache. Sous les tilleuls, entre les escaliers et le mur de la poste, il y avait un fossé où l’on pouvait sauter en cas d’urgence !
Le beau monde était invité au balcon chez Négueloua, juste en face de l’église. Une année, j’étais malade, j’avais une pleurésie, et j’avais demandé à ma mère de me mettre le lit près du balcon pour ne pas louper le spectacle !
A partir de 14-15 ans beaucoup de jeunes aimaient courir après les vaches. Il n’y avait pas beaucoup de filles qui couraient. Moi, en tout cas, j’adorais ça et j’ai même couru avec ceux qui attrapaient la cocarde, et il ne fallait pas avoir peur pour arracher la cocarde entre les cornes ! Bien sûr il y avait des tricheurs qui essayaient d’attraper la cocarde depuis les barrières où ils étaient à l’abri quand la vache passait à proximité ! Les courses étaient gratuites et ceux qui avaient la cocarde gagnaient l’apéritif chez Bordarrampé ! Je ne me suis jamais fait attraper par la vache, mais une fois j’ai eu très peur. Les plus trouillards allaient se cacher à la mairie quand la vache était sur la place de Tilleuls… Moi je me suis fait attraper bêtement une fois : je m’étais réfugié sur une fenêtre de l’église, pensant être à l’abri en hauteur, mais la vache m’a fauché les chevilles et je lui suis tombé dessus, et après elle ne m’a pas loupé !
Ginette, Laurent, Gracie, Kattalin, Renée, Pierrot, Jean, Margaux et Jeanine
EHPAD Larrazkena – Hasparren